Nous vivons une période troublée qui a forcément des impacts sur la gestion de nos entreprises : hausses des coûts des matières premières, de l’énergie, pénurie de mains d’œuvre, difficulté pour se faire régler ses factures, …

Tous ces éléments peuvent non seulement fragiliser l’entreprise et sa trésorerie au quotidien, mais aussi avoir un impact sur le chef d’entreprise lui-même.

Le chef d’entreprise pense souvent qu’il lui appartient de trouver seul les solutions.

Quelquefois cela peut fonctionner et le chef d’entreprise arrive à redresser la situation seul. Mais la plupart du temps, cela se termine avec un « dépôt de bilan » et un chef d’entreprise démotivé.

Pourtant des solutions d’accompagnement existent avant d’en arriver à ce que l’on appelle dans le langage courant « le dépôt de bilan » et qui se nomme juridiquement l’état de cessation des paiements.

Qu’est-ce que l’état de cessation des paiements ? 

L’article L.631-1 du code de commerce définit cette notion :

« Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. »

Concrètement, qu’est-ce que cela signifie ? 

L’état de cessation des paiements est le fait pour une entreprise de ne plus pouvoir honorer les dettes qu’elle doit payer avec la trésorerie dont elle dispose et les encours clients à percevoir.

L’entreprise peut connaître des difficultés de trésorerie ponctuelles et négocier un échéancier. Dans ce cas, cet échéancier est considéré comme un « prêt » du créancier et seules les sommes dues à l’échéance doivent être prise en compte pour déterminer l’état de cessation des paiements ou non.

Être chef d’entreprise, c’est également anticiper :

Être chef d’entreprise, c’est aussi anticiper les entrées et sorties d’argent et essayer de prévenir les éventuelles difficultés.

C’est à ce moment-là que le chef d’entreprise ne doit pas rester seul. Il doit savoir s’entourer et frapper aux bonnes portes.

Il y a toujours des signaux qui doivent alerter le chef d’entreprise :

  • La demande de délai pour pouvoir payer les fournisseurs,
  • Constat d’une augmentation des incidents de paiements chez les clients ou des retards de paiement,
  • Diminution des revenus du chef d’entreprise,
  • Dépassement de plus en plus récurent du découvert autorisé de l’entreprise,
  • Difficultés pour régler les charges et/ou la TVA,
  • Perte d’un client important,

Si votre entreprise est dans cette situation, deux réflexes à avoir :

  • Prendre rendez-vous avec votre expert-comptable pour déterminer d’où viennent les difficultés,
  • Prendre rendez-vous avec le Président du Tribunal de commerce dont dépend votre entreprise pour vous orienter vers des mesures d’anticipation des difficultés : le mandat ad hoc ou la conciliation.

Le mandat ad hoc comme la conciliation sont des mesures préventives qui permet au chef d’entreprise d’être accompagné dans la résolution des difficultés que l’entreprise connait ou est susceptible de connaître. Elles sont confidentielles.

Le chef d’entreprise peut à tout moment mettre fin à la mesure s’il estime que la mission du mandataire ad hoc ou du conciliateur est terminée.

Le mandat ad hoc

Même si rien n’est prévu par la loi concernant l’état de cessation des paiements de l’entreprise, il est préférable que l’entreprise n’y soit pas.

Pour qu’un mandataire ad hoc soit nommé, il faut saisir le Président du Tribunal de commerce dont dépend l’entreprise pour qu’il désigne le mandataire et délimite sa mission. Le Président du Tribunal de commerce fixe également les conditions de la rémunération du mandataire ad hoc lors de sa désignation.

Le mandat ad hoc est un outil qui permet de rétablir rapidement la situation financière de l’entreprise avec l’assistance d’une personne de confiance qui connait bien le milieu de l’entreprise et éviter une cessation des paiements.

Une fois les raisons des difficultés connues, le mandataire ad hoc peut assister l’entrepreneur à régler une situation conflictuelle (des clients, fournisseurs, associés, salariés, …), renégocier des contrats en cours, négocier les dettes de l’entreprise avec les principaux créanciers.

Cette mesure préventive est idéale lorsque l’entrepreneur n’arrive pas à cerner toutes les difficultés qu’il rencontre.

La conciliation

Lorsque le chef d’entreprise a identifié les causes de ses difficultés ou des difficultés à venir, il peut saisir le Président du Tribunal de commerce dont son entreprise dépend pour demander la nomination d’un conciliateur pour l’aider à négocier des accords avec ses principaux créanciers (administrations fiscales, URSSAF, banquier, fournisseurs, …).

Afin de s’assurer de l’étendu des difficultés économiques rencontrées par l’entrepreneur, le Président du Tribunal de commerce peut le convoquer et mandater un expert chargé d’établir un rapport sur la situation de l’entreprise.

Si le Président du Tribunal de commerce estime qu’il y a eu lieu à la mise en place d’une conciliation, il fixera les conditions de la rémunération du conciliateur en même temps que sa désignation.

Dans cette situation l’entrepreneur peut également se faire assister de son expert-comptable et/ou de son avocat.

Le conciliateur a pour mission de favoriser la conclusion d’un accord amiable entre les différentes parties en présence : échéancier, remise de dettes, …

Cette négociation est confidentielle et cette confidentialité s’impose à toutes les parties.

Si l’entreprise et les différents créanciers invités à la table des négociations trouvent un accord, celui-ci devra être soumis au Président du Tribunal de commerce qui constatera l’accord et lui donnera force exécutoire, c’est-à-dire que cet accord s’imposera à toutes les parties qui l’ont signé.

L’APESA : 

https://www.apesa-france.com/ 

Un chef d’entreprise peut avoir également besoin d’un accompagnement personnel ou d’une aide psychologique pour surmonter les difficultés qu’ils rencontrent.

Depuis septembre 2013, un organisme appelé APESA (Aide Psychologique pour les Entrepreneurs en Souffrance Aiguë) a été créé pour soutenir les entrepreneurs en difficultés.

Il s’agit d’une prise en charge gratuite et confidentielle par des psychologues spécialisés.

 

Nathalie CATTEAU LEFRANCOIS

Avocate associée

Barreau d’Alençon